Assisté par la tête chercheuse d'étoiles du one-man band Beirut, (un pote d'enfance), c'est les bagages gorgées d'idées de retour d'une retraite hivernale et méditative aux confins de
l'Alaska, que Brandon Bethancourt rentre à Albuquerque aux côtés de la féline Heather Trost (A Hawk & A Hacksaw) et entreprend d'agencer les lieux de cette future Dance Party. Le grand-nord
américain dans la fournaise balkanique, des cèdres du Liban trempant dans le Rio Grande ? Attention mappemonde obligatoire ! Vite doublé d'un planisphère, le voyage en perspective s'extrapolant
lentement mais surement hors la stratosphère avec comme seul véhicule une electronica à tiroirs tantôt synthétique, tantôt plus organique et toujours suggestive. Un drôle d'objet que cet album.
Treize titres qui poussent à l'introspection. Et cet étrange phénomène, tout de même, que l'amitié. Proches de longue date (cette histoire de Balkans, un délire de jeunesse, qui sait ?), Brandon et
Zach ont surement depuis un bail appris à partager. Chose qui transpire de cet album, même si le démarrage (The Homeless and The Hummingbirds) ou les aléas d'une lecture qui aurait décidé de
commencer par la fin (l'extraordinaire Close your Eyes - We are Blind), faisaient craindre une vampirisation cuivrée et esthétique du projet, tant la patte de Condon y est prégnante. Heureusement
pour tout le monde, les équilibres se remettent d'aplomb, chacun apportant ce qu'il, semble-t-il, maîtrise le plus, pour au final, un rendu des plus singuliers : une balade bucolique dans un recoin
du monde - et d'un cerveau - magnifiquement onirique et spleenétique. Il ne fait alors aucun doute sur les sources d'inspiration du bonhomme. Les étendues à perte de vue et les matins calmes
(Staring At the Sun et son crescendo clavier/voix), le climat (l'élégiaque Rain On Every Weekend et ses notes qui gouttent au piano ou les fields recording de Twenty Four Hours In Lake Of Ice
donnent le frisson), l'amour blessé (l'hyper compressé Lovely Lovely Love et son vocoder étouffant comme les violons mélos, trop peut-être, de The Beautiful Burial Flowers We Will Never See),
l'exil et la littérature (Don't Read Dostoyevsky et son piano à l'âme slave). Des thèmes qui énoncés comme ça laissent présager d'une bonne déprime bien plombée à l'arrivée, mais qui abordés comme
le fait Alaska In Winter - ivresse mélodique, nonchalance exaltée des voix avec un ou deux petits bémols sur leur traitement, immanquablement trafiquées et sur des textes un peu "cul-cul" par
endroit, dommage ! - restent bizarrement d'une énergie vivifiante. Mieux qu'une cure de Prozac, Dance Party In The Balkans vous laissera sur place, au milieu de la rue, sur un banc, dans un champ
ou le métro, déposé comme une plume et si ce n'est serein, du moins conquis, les yeux fermés mais mouillés, à l'inverse de ceux écarquillés des badauds, qui en nage sous le caniar de mai auront
bien du mal à s'expliquer pourquoi vous portez une chapka... blanche bien évidemment.
Chroniqué par
Yvan
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